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fotékrites

photographies pré-scriptrices et leurs écrits

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les tuiles oscillent aussi

Les stalagtites m’ont crevé les yeux comme des pics à mémorisation : dans sa chute le huitième ciel a laissé pour témoignage, en creux, dans la voute qui résiste, les mocarabes qui me blessent le voir.

Dans les cours intérieures, j’ai l’œil éclaboussé de bassins. Patio de los Arrayanes. Vestige ondulatoire, par le soleil qui fond la brique sur l’eau négative ! Les tuiles oscillent et les créneaux baissent la garde. J’ai pris la Tour des Comares, la plus haute de l’enceinte ! J’ai pris l’imprenable Alhambra !

Grenade, Espagne, 2014.

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l'imaginaire et le croisillon

Une ville en laiton. Les croisillons allègent le pont tout en l’armant de tendons bien rivetés. Cette image n’est que trop géométrique : elle m’empêche l’envol imaginaire, la faute aux légers cr-oisillons croicroi-croacroa-zillons, peut-être ?

Nashville, Etats-Unis, 2015

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suicide, 16ème étage

Les gratte-ciels devraient fondre au Soleil. Car il a, le Soleil, la puissance de pyramidaliser les rectangles qui ne sont même pas triangles. Car il est le vecteur des coups de mémoires, des vestiges. Car il recueille Kephren naguère et la caracole à Philly 2016. Je ne pharaone pas, je les vois tous derrière leur store, à tous les étages, s’affairer dans leur tombe. L’Iphone-amulette. L’Imac et les courbes. Le tableur excel. On meurt entouré de ces objets-là, dans ces pyramides-là.

 

C’est la première tour-cimetière au monde. Il n’y avait plus de place pour enterrer les gens. On allait raser cette tour.

Pékube y était né. Il s’est suicidé dans la Tour. Pas de la Tour. On ne peut en sauter, les fenêtres y sont scellées. Il s’est suicidé. Des amis, la famille, est venue déposer des gerbes. L’ancien appartement qu’il habitait a été envahi de fleurs, de couleurs fraiches comme il n’y en avait plus depuis que les habitants avaient été chassés.

 

On voulait construire plus haut. Raser pour construire plus haut encore. Ils ont pensé aux cimetières. C’est toujours le cauchemar des promoteurs. Le cimetière. Alors la sœur est venu déposer le cercueil de son frère la-dedans. Elle s’est suicidée et elle a demandé qu’on dispose pareillement de sa dépouille. Qu’on l’installe dans cette Tour que des promoteurs avaient fait vider pour la détruire et en construire une trois fois trismégiste plus grande en lieu et place de celle-ci. Qu’on lui trouve un appartement abandonné, peut-être sur le même pallier que l’appartement dans lequel son frère s’est suicidé et où elle a planté sa tombe.

 

Les anciens habitants ont tous pris leur vie et se sont fait déposer dans leur ancien appartement. Il en arrivait tous les jours des convois, des dizaines. Les autorités laissaient faire. On n’arrêtait pas un convoi funèbre dans ce pays-là. Sa priorité sur les autres automobilistes allait jusqu’au point qu’il était toujours accompagné par une voiture de police. A la fin, les habitants avaient retrouvé leur demeure. C’était leur pyramide. Les familles payaient pour maintenir l’air conditionné. Elles avaient le droit de venir se recueillir dans l’appartement du défunt. Y placer des offrandes.

 

Depuis la décision 2046.1 du 29 février 2021, le site est inscrit au Patrimoine Mondial de l’Unesco.

Philadelphie, Etats-Unis, 2016.

Cinématiques. Instructions pour l'arbre roi, court-métrage
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